Entrepreneuriat et permaculture partie 1 : Développement personnel et plan stratégique

S’investir dans un projet d’entreprise peut être très exigeant, voire obsédant. En avançant dans nos démarches, on réalise de plus en plus profondément tout ce qu’il nous manque comme connaissances, compétences et conditions entrepreneuriales pour réaliser concrètement notre vision, à la hauteur de notre rêve.

Une quinzaine de mois après avoir démarré La Lucarne Verte, j’en ai eu marre de m’informer seulement sur l’entrepreneuriat afin de me mettre à niveau. J’ai décidé de revenir au cœur de la raison pour laquelle j’avais entrepris ma démarche : comprendre les interactions invisibles du monde vivant pour réintégrer la nature dans ma vie, dans mon environnement.

Je me suis donc accordé du temps pour lire l’essai “L’intelligence des plantes” de Stefano Mancuso et Alessandra Viola, afin de ne penser qu’à la biologie des plantes un instant. Mais, je n’ai pas profité longtemps de cette “paix d’esprit” tant recherchée.

La nature est un grand marché

La notion d’échanges de ressources entre tout être vivant est au centre de ce livre.

Encore plus, l’importance de faire des choix stratégiques pour échanger nos ressources de manière optimale.

Assez vite, ce livre comparait le monde naturel à un grand marché : par exemple, les plantes offrent leur pollen et leurs fruits aux animaux. En échange, ces animaux déplacent les semences contenues dans ces éléments afin qu’elles puissent se répandre.

J’ai été étonné de l’insistance de cet ouvrage sur un point contre-intuitif : La nature n’offre rien gratuitement.

Ce message était en décalage avec le discours dominant que j’entends dans les différents mouvements écologiques ou “amoureux” de la nature, qui parlent d’abondance gratuite de la nature.

Tout est méticuleusement réfléchi et offert en échange d’autre chose. 

La nécessité de la stratégie

Au fil de l’évolution, certaines de ces interactions sont devenues très “naturelles”, car elles ont été constamment améliorées. Chaque espèce a développé sa spécialisation, qui lui permet d’interagir avec des espèces ciblées de manière fluide.

Mais, l’intelligence des plantes s’observe aussi dans la vie d’une même plante en tant qu’individu : c’est-à-dire que chaque plante a la capacité (l’intelligence) de s’adapter à son environnement en temps réel et de prendre des décisions stratégiques, grâce à ses multiples sens (bien plus nombreux que ceux de l’humain).

Ce livre expliquait cela par l’exemple simple d’une plante qui germerait au fond d’une grande boite de carton, complètement obscure, mais avec une très petite ouverture tout en haut. La plante, consciente d’une très faible quantité de lumière, fait un choix vital : Pousser le plus haut possible, afin d’espérer atteindre la lumière avant d’être à court de nutriments (ses ressources contenues dans la graine) et risquer la mort par épuisement de nutriments.

Ou bien, elle décide de conserver au maximum son énergie, et attend le retour de bonnes conditions pour pousser (sa sortie de la boite), tout en risquant également la mort, si ces conditions ne se présentent jamais.

Les expériences décrites expliquaient la notion de stratégie, puisque toutes les plantes placées dans ces mêmes conditions n’ont pas fait les mêmes choix.

Au fil de ma lecture, j’ai donc été ramenée encore plus profondément à ma réflexion entrepreneuriale. Sur quoi devrions-nous fonder pour prendre des décisions stratégiques?

Analyse de l’environnement

Avant d’évaluer comment se comporter stratégiquement dans notre environnement, il est essentiel de bien le connaitre.

La réflexion stratégique, en permaculture, se nomme par la méthode “B.O.L.R.E.D.I.M”:

  1. Buts/Besoins
  2. Observation
  3. Limites (contraintes)
  4. Ressources
  5. Analyse
  6. Design
  7. Implantation
  8. Maintenance
  9. Évaluation

C’est une méthode circulaire et itérative: dès qu’on arrive à la dernière étape de l’évaluation, on adapte nos buts et nos besoins, et on recommence le cycle d’observations, d’ajustements et d’évaluation.

Avant d’évaluer comment se comporter stratégiquement dans notre environnement, il est essentiel de bien le connaitre.

En parlant d’environnement, on pense souvent à ce qui nous entoure, comme notre jardin, notre ville et la campagne autour, voire les grands écosystèmes de notre région, et à la manière de le gérer de manière responsable.

Mais la notion d’environnement se complète d’une autre dimension: soi-même, comme point de départ.

Analyse interne

Avant de pouvoir s’intégrer dans l’écologie d’un milieu, il faut comprendre et maîtriser sa propre écologie intérieure.

Autrement dit, il faut savoir ce qui nous distingue, quelles sont nos forces et nos faiblesses, afin d’offrir le meilleur de nous-mêmes à la communauté, et de s’allier avec des personnes ou des outils qui compléteront nos faiblesses.

Permaculture humaine

J’ai découvert en cours de route la permaculture humaine, une autre branche de la permaculture, axée sur notre rôle individuel et collectif dans les changements à adopter pour réussir la transition socioécologique nécessaire.

Cette approche se fonde sur l’idée que chaque individu a une raison d’être qui lui est propre, et que plus il aligne son mode de vie et ses actions pour l’accomplir, plus son impact positif sur son environnement est grand.

La permaculture humaine pense également que la nature, la grande source d’inspiration et d’enseignement dans la philosophie de la permaculture, dispose de tous les outils et les ressources pour nous montrer le chemin nécessaire vers l’accomplissement de soi.

Finalement, selon ces idées, le développement personnel et l’engagement écologique vont de pair.

Plus on s’approche de notre véritable “nature”, plus on est en mesure d’agir pour le mieux-être de l’environnement et des communautés.

La zone 00: un design respectueux de la personne

En permaculture, pour s’assurer de toujours partir de soi, de nos propres besoins et capacités, on a illustré ce concept en l’intégrant dans une méthode de design qui se nomme les “zones”. 

En effet, selon le concept des zones, initialement numéroté de 1 à 5, on conçoit le plan de notre terrain de manière holistique, en positionnant très près de notre maison et notre lieu quotidien les éléments qui ont besoin de maintenance quotidienne.

De la même manière, les éléments qui n’ont pas besoin de beaucoup d’attention peuvent être placés plus loins de notre maison, car on n’a pas besoin de s’y rendre à tous les jours.

La zone 1 est la plus près de la maison, tandis que la zone 5 est la plus éloignée.

L’idée est donc de sauver du temps et de l’énergie en évitant les trajets  inutiles et en réduisant le temps de déplacements requis pour effectuer les tâches les plus fréquentes.

Par exemple, un poulailler, qui doit être entretenu chaque jour, est placé très près de la maison, tandis qu’une plantation d’arbres à chauffage, qu’on peut couper à certaines périodes de l’année, peut être à l’extrémité de notre terre.

En permaculture humaine, on a fait ajouter la zone 00 afin de considérer les personnes impliquées dans le projet de manière importantes, afin d’illustrer que c’est la zone la plus prioritaire à bien respecter afin que le projet puisse être durable.

En effet, si le projet de permaculture ne répond pas au besoin de la personne qui s’en occupe, elle risque fortement l’épuisement, puisqu’ elle vivra ses tâches comme des obligations davantage que du plaisir.

Analyse externe

Une fois que l’on sait mieux qui l’on est, on peut identifier un problème dans la société auquel nous croyons être en mesure d’apporter une solution par notre projet entrepreneurial.

Parfois, cette découverte découle naturellement de la connaissance de soi, selon le type de solution que nous pouvons développer. Mais d’autres fois, cela demande une réflexion et un “effort” d’analyse externe plus approfondi.

On veut également s’assurer de prendre des mesures et indicateurs de notre environnement d’intervention avant, pendant et après la mise en place de notre solution, afin d’en évaluer les impacts.

Cette étape d’analyse est donc très importante.

Aujourd’hui, avec l’analyse de la crise écologique et économique sans précédent nous rappelle qu’il est essentiel d’agir et d’entreprendre, si nous croyons avoir une solution.

Design et implantation

Utiliser les services et ressources de la nature

Un des principes de conception la permaculture avance que nous avons avantage à connaitre les fonctions de chaque élément de notre environnement afin d’en profiter.

Par exemple, un arbre crée un petit îlot de fraicheur par sa simple présence: il fournit de l’ombrage et augmente l’humidité de l’air dans son pourtour grâce à sa transpiration.

Il est donc stratégique de connaître ces propriétés et utilités de chaque élément afin de mettre les éléments en relation de la manière la plus optimale possible.

En entrepreneuriat, c’est la même chose. Par exemple, il sera plus facile de démarrer une entreprise d’éoliennes si nous avons accès à des grands champs ou à des régions côtières où le vent ne sera pas freiné, et pourra faire bénéficier les éoliennes de son service.

De la même manière, il serait logique d’installer une terrasse de restaurant à proximité de grands arbres, afin de profiter de leurs services.

Produire une récolte

Un autre principe essentiel de la permaculture en entrepreneuriat, c’est de produire une récolte.

En permaculture, dans une fermette, on envisage cette récolte comme un produit alimentaire (fruit, légumes, verdures, miel, oeufs, etc.), un produit utilitaire (bois de chauffage, savons, engrais, etc.) ou un produit immatériel (lieu de rencontre, lieu de ressourcement, etc.).

En entrepreneuriat, la récolte devient le résultat financier des produits ou des services. Il peut se calculer en capital financier ou même social.

Les mêmes récoltes d’une fermette peuvent être directement vendues telles quelles (légumes miels, bois, etc.), ou encore, on peut créer une récolte secondaire, comme un service de formation, d’accompagnement ou encore une production artistique.

Cela peut s’intégrer parfaitement dans le concept de couches de marché primaire, secondaire et tertiaire.

L’éthique de la permaculture

Finalement, et non le moindre, la permaculture apporte encore plus à l’entrepreneuriat, car à son système éthique.

En effet, selon cette philosophie, toute action devrait respecter 3 piliers essentiels qui font l’unicité de la permaculture et qui la rapproche du développement durable:

  • Prendre soin des humains
  • Prendre soin de la terre
  • Partager les surplus

En résumé, la permaculture, par son ensemble de principes et de méthodes, permet d’agir comme un guide dans une création d’entreprise qui soit éthique et adaptée à nos besoins et à notre milieu de vie.

Avant tout, la permaculture permet de développer notre entreprise par l’approche du développement personnel et stratégique.

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